Publication initiale de certaines de ces photographies, dans la revue « Planète chinois N° 18 » du Centre National de Documentation Pédagogique
Qui veut vraiment comprendre ce que signifie une invasion touristique n’a qu’à se rendre une fin de semaine dans l’une des villes de canaux (水乡) de la région de Shanghai : Zhouzhuang (周庄), Zhujiajiao (朱家角), Wuzhen (乌镇) ou Tongli (同里). Antiques ponts en dos-d’âne, voies d’eau et vielles demeures d’ordinaires paisibles disparaissent alors sous une marée humaine fuyant la plus moderne des métropoles chinoises.
Et pourtant, pour se plonger un peu dans le passé shanghaien, nul besoin de quitter l’agglomération. A moins d’une vingtaine de kilomètres et à plus d’un siècle des tours futuristes de Pudong, ignoré des hordes de visiteurs, au cœur du district de Minhang (闵行), le « bourg aux sept trésors » offre, sur une superficie réduite, une excursion dans le temps.
Edifié sous les Song, prospérant sous les dynasties ultérieures, Qibao serait ainsi nommée pour les uns selon son temple, pour les autres, plus nombreux, parce que ce dernier est censé contenir autant d’objets précieux, à l’existence plus ou moins avérée : un Bouddha de fer, une cloche de bronze datant des Ming, un manuscrit du Sutra du Lotus enrichi d’or, rédigé par une concubine impériale du Xe siècle, un « arbre aux haricots » millénaire, une hache et des baguettes en jade, un coq d’or…
Au long des canaux bordés de saules pleureurs alimentés par les affluents du Huangpu et de la rivière Wusong, le bourg a bâti sa renommée sur la créativité de ses tisseurs, l’habileté de ses menuisiers – maîtres des seaux et baignoires en bois… -, son alcool et ses spécialités culinaires : agneau au vin jaune, gâteaux de riz cuits au four…
Au nombre des activités préférées des anciens Chinois, les combats de criquets suscitent aujourd’hui encore les passions. Le musée des Criquets de Qibao (蟋蟀草堂) organise un Festival annuel de la culture du criquet, ainsi que des combats durant les fameuses « semaines d’or » de mai à octobre.
Mais aussi, dans ce musée, l’on peut découvrir nombre d’autres métiers anciens : Office de prêteur sur gage, ateliers de tissage, apothicaires traditionnels, salon de tatouage, boutiques offrant au marchandage tout et le reste… mais aussi spectacles de théâtre d’ombres, introduit, dit-on, à Shanghai par un habitant de Qibao, et qui, joué en dialecte local, met en mouvement sur une musique expressive des figures colorées ressuscitant des épisodes historiques fameux.
On sait la passion des Chinois à miniaturiser le monde : bonsaï, paysage sur un grain de riz, poème sur un cheveu, texte sur un cure-dent… Le musée de la Miniature de Qibao (微雕馆 ) en offre une fascinante collection.
Qibao, où il vécut, abrite le mémorial de Zhang Chongren (张充仁)
Zhang Chongren a été un élève de l’orphelinat jésuite T’ou-Sè-Wè de Shanghai. Il est parti dans les années 1930 étudier les beaux-arts à Bruxelles. C’est là qu’il a rencontré Hergé qu’il initia à la culture chinoise : Tintin et le Lotus bleu lui doivent beaucoup.
Rentré en Chine en 1936, Zhang, peintre et sculpteur, réalisa un buste de son ami Hergé dont il fut sans nouvelles quarante années durant. Directeur de l’Académie des beaux-arts de Shanghai dans les années 1970, cantonnier durant la Révolution culturelle, il devint citoyen français à la fin de sa vie et mourut à Nogent-sur-Marne.
Le Président François Mitterrand avait choisi Zhang Chongren pour réaliser son buste. Le musée Zhang Chongren présente, en bonne place, une photographie du buste du Président français.
Qibao : la place qui se trouve à l’entrée de la rue commerçante
Le canal qui traverse le quartier commerçant de Qibao crée une ambiance calme et reposante très appréciée des Shanghaiens. Il n’est situé qu’à 17 km, soit à un quart d’heure en voiture, du centre de la mégapole.
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